Pomme: « J’ai un besoin permanent de me mettre en danger »

Pomme a beaucoup prononcé le mot « yolo » lorsqu’elle était ado, avec légèreté. À 26 ans, il a pris pour elle une connotation bien plus dense. Par Anne-Sophie Kersten. Photo: Laetizia Bazzoni.

La citation de Pomme

« Il y a dix ans, avec « yolo », ma génération disait quelque chose comme: « Cool, rien n’a d’importance. » Aujourd’hui, j’y vois tout l’inverse. « You only live once » signifie qu’on n’a qu’une seule vie. Même pour ceux qui croient en la réincarnation ) ce qui n’est pas mon cas – cela inviterait à considérer que cette vie-ci est la plus importante, que c’es celle dans laquelle je suis investie. Je suis quelqu’un qui cherche tout le temps à se dépasser, à sortir de sa zone de confort. J’ai un besoin permanent de me mettre en danger, par exemple en allant sans cesse vers de nouveaux projets qui font relativement peur. Par exemple quand je réalise mes clips, la base de l’écriture sera toujours « quelque chose qui me fait peur ». Dans le clip de Je sais pas danser (album Les Failles), je danse, alors que ça m’effrayait de ouf. Ce sont de tout petits mouvements, certes, mais à la fin du clip, il y a une espèce d’improvisation où je danse entourée de stroboscopes : ça, auparavant, ça aurait été impossible pour moi ! Dans le clip des Oiseaux, je pleure devant ma webcam alors que je ne pleure jamais devant personne. Par ailleurs, le fait de jouer dans un film — comme je le fais actuellement — représente pour moi une énorme mise en danger, bien au-delà de la scène où mes cheveux sont tondus. »

Ton yolo à toi est exigeant.

« Oui, en avançant, je me rends compte que j’accorde de plus en plus d’importance à la chance d’être en vie. Je veux en faire quelque chose. »

« J’ai peur de la mort. J’en parle tout le temps dans mes chansons. J’ai peur de la finalité. De l’inertie, en fait »

Ça a quelque chose de flippant, de se dire qu’on n’a qu’une vie.

« Oui, je suis hyper effrayée. J’ai peur de la mort. J’en parle tout le temps dans mes chansons. J’ai peur de la finalité. De l’inertie, en fait. C’est pour cela que j’entreprends un milliard de trucs et que je suis incapable de m’arrêter. Mon incapacité à prendre le temps — parce que j’ai l’impression qu’il est compté — est mon sujet principal avec les psys que je consulte depuis dix ans. »

C’est un peu contradictoire avec l’aspect « Savourez l’instant » qu’on peut entendre dans « yolo ».

« Oui ! Et dire que le présent, c’est déjà le passé : méga-angoissant ! J’ai ressenti cette inquiétude très tôt. Déjà préadolescente, je n’avais pas envie de vieillir. Et je n’aime plus mes anniversaires. »

Comment fais-tu pour revenir au présent quand tu es happée par ton envie de vivre à fond ?

« Je vais au cinéma. C’est comme une réalité parallèle où me je sens confortable, un espace qui n’a pas vraiment de contours, puisqu’on est tous plongés dans le noir avec un système son à 360°. Je reviens au présent à travers la lecture aussi, qui est plus exigeante car il faut soi-même créer sa bulle. Quand tu y arrives, c’est magique. J’adore ça. Le dernier livre qui m’a vraiment marquée est L’Art de la joie de Goliarda Sapienza, 600 pages que j’ai lues en trois semaines. L’histoire est inspirée de la vie de l’autrice, qui a vécu en Sicile au début du 20e siècle, pendant les révolutions communistes. Je lis le soir avant de m’endormir ou le matin en buvant mon café, quand j’arrive à dégager du temps avant ma journée de travail. »

Tu te lèves tôt ?

« Oui, méga tôt. Si tu es yolo, ça s’impose ! »

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