Adeline Dieudonné: « Je n’osais dire à personne que j’écrivais un roman »

Multiprimé, multitraduit, son premier roman, La Vraie Vie, l’a révélée en 2018, à l’âge de 35 ans. Notre Guest du mois de juin Adeline Dieudonné récidive avec Kérozène, qui promet déjà un succès explosif. Regard angélique mais talent diabolique, elle nous a laissées lire entre ses lignes. Par Paloma de Boismorel. Photos: Laetizia Bazzoni.

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Adeline Dieudonné, en vrai

C’est toujours la même chose avec les écrivains, ils ont l’air anormalement normaux. Une normalité qui est forcément suspecte quand on pense aux multiples liaisons qu’ils entretiennent, aux crimes dans lesquels ils trempent et au pouvoir sadique qu’ils exercent sur la destinée de leurs personnages. Le cas d’Adeline Dieudonné ne fait pas exception. Alors que les protagonistes de Kérozène, son dernier roman, sont franchement inquiétants, la romancière me reçoit à la table en bois de sa cuisine avec une décontraction souriante. Interrogée sur son enfance que j’espère pleine de secrets, notre Guest me parle d’une vie à la campagne entourée d’animaux et de sa lecture enthousiaste, à l’âge de 8 ans, des Mémoires d’un âne de la comtesse de Ségur. Suis-je en train d’interviewer un écrivain sans histoire ? Sous sa frange de cheveux dorés, mon interlocutrice me raconte les peurs que lui inspire ce monde ultra-violent dans lequel elle a donné naissance à deux filles. Elle me confie la façon dont l’écriture a fait ressortir des émotions négatives trop longtemps refoulées par l’éducation et la société. Comme il fallait s’y attendre et comme la plupart des génies littéraires, Adeline Dieudonné a caché sa véritable folie dans ses livres. 

Étais-tu une petite fille sage ?

Oui, oui, très sage. Mes parents disaient toujours que c’était un bonheur d’avoir une enfant aussi facile. Je crois que ça m’a conditionnée à ne pas savoir dire non. En plus, ils me construisaient un peu en opposition avec ma sœur, qui était vue comme une enfant plus capricieuse. Du coup, j’ai beaucoup de mal à faire entendre mes besoins et à mettre des limites. C’est ce qui m’a inspiré le personnage de Julie, dans Kérozène. Cette fille qui accepte l’inacceptable parce qu’elle ne sait pas dire non.

Avais-tu un petit frère à protéger, comme l’héroïne de La Vraie Vie ?

J’ai deux petits frères, mais j’ai des rapports très différents avec eux. Le premier a un peu moins de deux ans de moins que moi et le deuxième est venu beaucoup plus tard, quand j’avais 13 ans. Là, il y avait un vrai instinct de protection, parce que j’étais suffisamment grande pour comprendre sa fragilité. C’était presque un rapport mère-enfant. Le fait de réaliser à la fois sa vulnérabilité et son insouciance face au danger m’a donné des angoisses terribles.

« Quand j’ai commencé à écrire La Vraie Vie, il y a vraiment eu un sentiment de transgression. »

As-tu puisé dans ces angoisses pour décrire la relation frère-sœur dans La Vraie Vie ?

Complètement. À la différence que nous, on a grandi dans un cadre familial très rassurant et très bienveillant. Il n’y avait pas cette adversité dont l’héroïne essaie de protéger son frère en permanence.

Tu n’étais pas le genre de petite fille qui gribouille toute la journée et qui raconte qu’elle veut devenir écrivain ?

Non, déjà parce que dans ma famille, il n’y a pas d’artistes. En fait, pour moi, les écrivains, c’étaient des gens qui pour la plupart étaient morts. Je ne m’identifiais pas du tout à eux. Et d’ailleurs, quand j’ai commencé à écrire La Vraie Vie, il y a vraiment eu un sentiment de transgression. Je n’osais dire à personne que j’écrivais un roman, parce que je trouvais ça très prétentieux. Je pensais aussi que c’était un truc réservé à des gens qui avaient fait des études de lettres et moi, je n’avais pas fait d’études. Non, quand j’étais petite, je voulais faire éleveuse de chiens ou garde-chasse à cheval.

Tu écris pendant de longues périodes ou plutôt par petites séances ?

Ce que je préfère, c’est faire des résidences d’écriture, parce que je peux me dire que pendant deux semaines, je ne vais faire que ça. L’idéal c’est même de partir de Bruxelles. Comme ça, je suis sûre qu’il n’y a rien qui vient s’interposer et que je peux complètement me laisser absorber par l’écriture.

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