Ma vie d’hypocondriaque: « Quand je m’endors, j’ai peur de ne jamais me réveiller »

Se sentir terrifié(e) dès que vous découvrez un bouton sur votre corps. Vérifier chaque matin si vos membres fonctionnent correctement. Croire que l’on est atteint d’une maladie grave à chaque migraine et courir chez le médecin à la moindre crise d’angoisse: la vie d’hypocondriaque n’est pas de tout repos. Pour les personnes atteintes de ce trouble mental, ces pensées angoissantes et énergivores sont présentes au quotidien. Clara vit avec depuis son plus jeune âge, mais, du haut de ses 34 ans, elle reconnaît que son hypocondrie a atteint des sommets...

Le témoignage de Clara

« J’ai toujours eu peur des maladies, plus particulièrement des cancers », commence Clara. « Mais ce n’est que lorsque j’ai atteint la vingtaine que mes pensées ont commencé à devenir plus présentes voire excessives... Mon médecin m’a dit que je souffrais d’angoisses et ces angoisses se manifestent principalement par de l’hypocondrie. Des craintes qui n’ont fait que s’accentuer et qui ont atteint un sommet culminant en 2020, avec le corona...« 

La pandémie, une phobie

« Si vous m’aviez demandé quelle était ma plus grande peur avant 2020, je vous aurais répondu une pandémie... », explique la jeune trentenaire. « Quand ce virus a envahi le monde, cela a réveillé de grandes peurs. Je me sentais constamment malade. Je sentais toujours une petite gêne dans ma gorge ou mes poumons. Beaucoup de gens partageaient mes angoisses, je ne me sentais pas seule, mais tout a changé lors du premier été passé sous l’ère corona... À partir de ce moment, mes angoisses ne me quittaient plus et ne concernaient pas uniquement le covid-19. « 

« Quand je sentais que j’allais m’endormir, j’avais peur de ne plus me réveiller. Je craignais d’être atteinte d’un cancer du poumon, d’une tumeur au cerveau... »

« Quand je sentais que j’allais m’endormir, j’avais peur de ne plus me réveiller. Je craignais d’être atteinte d’un cancer du poumon, d’une tumeur au cerveau... Je m’auto-ausculptais constamment afin de percevoir des symptômes. Est ce que j’avais encore suffisamment de force dans les mains? Cela pouvait être le signe de sclérose en plaque ou de la maladie de Charcot. Mes peurs ont tellement pris le dessus sur moi, je pensais que j’allais mourir. J’essayais d’accepter le fait que je n’allais pas avoir l’occasion de vieillir. Ma vie entière défilait devait mes yeux tous les soirs et cette séquence se terminait toujours de la même manière: une image de moi sur mon lit de mort entourée par ma famille. »

D’une maladie à l’autre

« De temps en temps, j’étais obsédée par une autre maladie. Je passais du covid à la leucémie au cancer du côlon. J’avais l’impression de sentir des boules partout, de mes mollets au cou. J’avais peur de m’endormir et de ne plus jamais me réveiller. Un caillot de sang pouvait me tuer! Toute mon énergie était utilisée pour imaginer les pires scénarios d’horreur et tenter de me raisonner. Tout ce que je pouvais faire, c’était m’allonger et regarder la télévision pour me distraire. Se doucher, nettoyer, cuisiner… je reportais ces tâches autant que possible, je m’étais transformée en un zombie. J’effectuais le strict minimum afin que les gens ne s’inquiètent pas de ce qu’il se passait réellement sous mon toit. Je ne voulais pas en parler, car cela rendrait cette situation réelle... »

La nuit où tout a basculé

Une nuit d’été, Clara a complètement perdu le sens de la réalité. « Mon copain de l’époque était parti en week-end à l’étranger. Je me suis réveillée au beau milieu de la nuit et je n’osais pas me rendormir: j’étais effrayée à l’idée qu’un caillot de sang me tue. Je le sentais venir et j’ai fait une crise de panique. J’ai finalement réussi à me rendormir, mais, à mon réveil, j’étais persuadée que mon compagnon était mort dans sa chambre d’hôtel. Peut-être était-ce une bagarre qui avait mal tourné? Ou une intoxication au CO2... Mes peurs étaient projetées sur mon entourage, ça allait dans tous les sens. J’ai décidé d’appeler ma mère et je tenais des propos incohérents. Je lui ai dit que mon compagnon était mort, que la police allait retrouver son cadavre, j’étais sûre de moi. J’ai vraiment perdu contact avec la réalité. Quelques semaines plus tard, mon médecin m’a dit que j’avais probablement fait une psychose. Elle m’a conseillé de contacter un psychologue et à prendre des anti-dépresseurs. Je ne voulais plus jamais vivre une expérience pareille. »

Sa thérapie

Les médicaments ont rapidement fait effet sur Clara. « Quand j’ai retrouvé un peu de stabilité, j’ai compris à quel point cela avait été loin. Mes angoisses se traduisaient par des symptômes physiques. Vu que j’étais angoissée, mon corps se mettait dans un mode de défense et accélérait ma respiration entraînant des étourdissements. Les médicaments ont aidé mon corps à se relaxer. Mon médecin de famille a pris le temps d’écouter mes angoisses. Il m’offrait toujours du réconfort, c’est malheureusement quelque chose qui fait souvent défaut aux hypocondriaques. J’ai eu de la chance d’avoir un médecin aussi compréhensif et à l’écoute. Mon hypocondrie n’a pas complètement disparu, mais elle est nettement plus gérable, je peux me concentrer sur d’autres choses et vivre normalement. Mais ces angoisses feront toujours partie de moi. J’évite d’alimenter mes angoisses en faisant des recherches en ligne, j’essaie aussi de limiter mon exposition à des séries médicales. »

**Clara est un pseudonyme. La photo provient d’une banque d’images.

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