Prix littéraire Gael: l’avis du jury

Durant les longues soirées d’automne qui s’annoncent, si vous vous évadiez dans de jolies lectures? Pour l’inspiration, laissez-vous guider par nos jurés. Cette semaine, ils vous donnent leur avis sur Citoyen Park de Charly Delwart.

Delphine Motte

Le livre retrace l’ascension de Jung-wan dans l’ombre de son père dictateur au Kamcha. Sa naissance, le retour au pays, la propagande, l’instauration du régime dictatorial et enfin la succession. L’intéressant dans ce livre est de voir toutes les mesures de propagande mises en place pour soutenir le régime dictatorial et contenir les volontés du peuple. Aveuglement et démesure également lorsque Jung-wan continue de bâtir des structures incroyables alors que son peuple meurt de faim.

Par contre c’est beaucoup trop long. On s’embête, perdu dans les pensées Jung-wan, qui veut encore rédiger un livre sur leur philosophie Muju, encore réaliser un livre, encore construire une statue, encore changer de compagne...  On pourrait réduire de 500 à 300 pages, ce serait beaucoup mieux.

Julie Matagne

Le citoyen Park Jung-wan, fils du Grand Meneur, est le Révéré Cher Gouvernant du Paradis des travailleurs, le Kamcha du Nord. Sur 500 pages, Charly Delwart développe l’itinéraire intérieur de ce personnage inspiré du dirigeant Kim Jong-il.

Elevé dans le culte de son père, révolutionnaire qui a mené la lutte pour libérer son pays des envahisseurs japonais, Jung-wan s’efforce de correspondre à l’image du héros dont les récits ont baigné son enfance. La naissance du totalitarisme, les efforts nécessaires pour durer, la volonté de supprimer le doute, d’être tout entier porté par la conviction, voilà à quoi s’attache l’héritier. "Peut-être était-il comme ça par réaction, comme s’il n’avait pas eu le choix, son père prenant le dedans, lui le dehors des choses, il se demande." Et le lecteur de se demander si Charly Delwart n’est pas resté lui aussi trop en dehors pour que passent ces pages longues comme les hivers sur le mont Jangsu. 

Joël

L'idée de départ était pourtant séduisante: une biographie romancée autour du personnage de Kim Jong-Il, le dictateur nord-coréen récemment disparu, était sans nul doute un terreau littéraire fertile. On suit ainsi l'enfance du futur dictateur, qui apprend que le passé peut toujours se récrire a posteriori de façon plus séduisante ou plus avantageuse. On découvre son goût pour le cinéma occidental qu'il essayera de copier tant bien que mal pour en faire un outil de propagande à sa propre gloire, et on l'accompagne dans son ascension programmée à la tête de l'Etat du Kamcha (pour ne pas dire Corée...) du Nord, qu'il dirige comme un réalisateur a la main sur son film.

Malheureusement pour le lecteur, il est presque aussi difficile d'entrer dans ce récit que de sortir de Corée du Nord: l'écriture, chaotique et bousculée, se veut le reflet des pensées de Park Jung-Wan mais rend la lecture de ces 500 pages plutôt pénible. Et on pourra regretter que l'auteur ait, semble-t-il, eu du mal à trancher entre une véritable biographie et un roman qui aurait pu être bien plus décalé.

Anne Meyer

Le sujet de cette brique de près de 500 pages est étonnant et intrigue.

L'histoire est celle d'un pays, le Kamcha du Nord et de deux hommes, le père Minh-hun et le fils Jung-wan qui veulent le libérer et le reconstruire à leur image.

Le père a sauvé le pays du joug japonais ce qui en fait l'admiration de Jung-wan qui, lui, le gèrera à sa manière en adoptant les méthodes de travail révolutionnaires et axées sur le peuple, devenant le Héros de la République populaire démocratique.

Pour imposer ses idées, Jung-wan -épris de cinéma- se lance dans la réalisation de films qui ont pour but de réveiller la fibre patriote; les récits de son père deviennent scripts et fictions.

Ce roman, fiction et cie, est en fait une parodie du régime de Kim II Sung qui a dirigé la Corée du Nord, le Kamcha lui ressemblant étrangement; celui-ci est dirigé d'une main de fer comme l'a été la Corée du Nord, dictature de type totalitaire stalinien.

L'auteur avoue avoir étudié le parallélisme entre les pays, leur gouvernance ainsi que les différents successeurs père et fils, lui servant de modèles.

Charly Delwart, jeune écrivain belge, nous livre un récit dense, d'une écriture très serrée, dans un style purement descriptif ou narratif, sans dialogue ni réelle histoire qui n'est pas d'un accès facile.

Pour lecteurs avertis!

Catherine Hénaut

Au travers de l’histoire d’une région méconnue de l’Asie du Nord, l’auteur nous raconte l’ascension au pouvoir de Park Jung-Wan, fils d’un révolutionnaire et héros libérateur qui sauva son pays, le Kamcha, de l’invasion japonaise.

Le régime dictatorial mis en place au Kamcha du Nord et la plus grande liberté présente au Kamcha du Sud ne sont pas sans nous faire comparer cette fiction avec la Corée du Nord et la Corée du Sud.

On éprouve presque de la sympathie pour le héros, né sous un autre nom dans un camp en Sibérie, d’une mère révolutionnaire active et d’un père qui deviendra le grand Min-Hun, leader et Grand Meneur du Kamcha du Nord.

Après une période de doutes, Park Jung-Wan devra faire fi de ses souvenirs d’enfance et de son penchant pour les films occidentaux, pour se consacrer à un seul objectif, son pays, qu’il va mener d’une main de fer, avec le pouvoir de vie ou de mort sur ses sujets, suivre les traces de son idéologiste de père pour accéder lui aussi au pouvoir, et  diriger son pays avec en toile de fond une fiction dans un studio de cinéma grandeur nature, tout comme à Hollywood, avec la population comme figurants, et tirer les ficelles des marionnettes pour les faire avancer ou reculer selon son propre gré.

Un style d’écriture déstabilisant, des phrases hachées, comme coupées au couteau, mais une lecture non dénuée d’intérêt pour les amateurs de roman historique malgré l’envie parfois de refermer le livre.

Nathalie Aubry

J’étais impatiente de lire ce roman, car le lieu-même où se déroule l’histoire me rappelle un pays qui m’est familier.

Mais quelle déception car si ce livre est très bien documenté, l’écriture n’en est pas moins fastidieuse!

Le style haché, les phrases sans verbe rendent la lecture agaçante et difficile.

C’est dommage car certains chapitres nous accrochent; quand la fiction se mêle à la réalité, quand la folie des grandeurs touche aussi bien la star que le dictateur, alors, en effet ces passages sont vivants et captivants.

Cela porte à réfléchir malgré tout.

Citoyen ParkCharly Delwart, Éd. Seuil

Prix GAEL/Libris en collaboration avec Libris Agora

A.D. et S.Z.

Contenu des partenaires

Contenu sponsorisé