Nathalie Uffner: « Ne pas laisser tomber, c’est survivre »

Avec nous, notre Guest Nathalie Uffner, comédienne et directrice artistique du Théâtre de la Toison d’Or, revient sur son parcours et ses expériences.

Qu’est-ce qui t’amuse dans ton boulot?

J’ai eu la chance d’enchaîner quelques succès ces derniers temps, et je crois que je peux désormais me faire confiance. Je suis très à l’écoute des comédiens, pour autant qu’ils me fassent des propositions. Là, quand je peux prendre ce qu’on me suggère et le transcender, c’est hyper excitant et jubilatoire. Orgasmique, même. Mais quand je suis face à quelqu’un qui ne propose pas, je pense que je ne suis pas un bon metteur en scène. Ça me bloque. J’ai appris ce métier en le faisant, je ne suis pas une grande technicienne. Face à quelqu’un de très structuré, je peux paraître brouillonne. Ma chance, c’est d’avoir réussi en étant ce que je suis. Et de pouvoir travailler avec des gens qui me connaissent, qui comprennent mon langage et qui croient en moi.

Ton parcours a souvent été entravé par des gens qui ne croyaient pas en toi. Tu as raté l’examen d’entrée à l’INSAS. Ensuite, tu as atterri au Conservatoire où, après quelques années, on t’a gentiment dit que si tu choisissais une autre orientation, ce serait une bonne idée...

Je ne suis pas du tout revancharde. Mais c’est vrai que ça m’a blessée à mort à l’époque. On me demandait pourquoi je voulais être comédienne, on me conseillait de devenir régisseuse. Aujourd’hui, je suis du côté de ceux qui peuvent décider, qui engagent des petits jeunes, qui font passer des auditions...

‘ »IL Y A CHEZ MOI UN TRÈS GRAND INSTINCT DE SURVIE QUAND JE SUIS CONFRONTÉE À UN ÉCHEC... »

Dernièrement, j’ai fait défiler quelques attachées de presse potentielles, dont une qui me plaisait beaucoup. Au deuxième tour de la procédure de recrutement, la jeune fille m’a présenté une simulation de communication bâclée, très décevante, pas du tout professionnelle. Je me suis souvenue de ces fameux jurys où on me rejetait sans m’en expliquer les raisons. Et je me suis dit que j’avais la responsabilité de faire comprendre à cette fille pourquoi on ne l’engagerait pas. Je pense que c’est notre rôle, quand on est de ce côté de la barrière, d’être constructif et pédagogue.

Qu’est-ce qui t’a permis de continuer à croire en ton rêve?

Si je veux être tout à fait honnête, je dois reconnaître que je ne pense pas avoir véritablement vécu des injustices. Je crois qu’en effet, quand on me rejetait, c’était pour de bonnes raisons. Mais il y a chez moi un très grand instinct de survie quand je suis confrontée à un échec. Et cet instinct me disait alors qu’il fallait que je m’acharne et que je m’améliore. Au fond de moi, je sentais que si je laissais tomber, j’allais toujours tout laisser tomber et que quelque part, j’allais en mourir. Ne pas laisser tomber, c’était survivre. Peut-être que ça a un rapport avec cette blessure qui me traverse même si je ne l’ai pas directement vécue. Avec cette Shoah qui a tellement marqué mes parents, qui ont été des enfants cachés.

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