Lio: « Je suis de plus en plus prête à accepter la peine de mon enfant intérieur »

Entre deux shootings, notre GAEL Guest, l’icône Lio, se confie sur les instants de sa vie, les mantras qui la guident et son passé douloureux. Rencontre.

Il existe des phrases, des mantras qui vous réconfortent?

Un aphorisme arabe m’a suivie pendant de longues années, mais je ne l’utilise plus maintenant, je fais d’ailleurs juste l’inverse: «Ne baisse pas les bras, tu risquerais de le faire deux secondes avant le miracle.» Aujourd’hui, je n’attends plus de miracle et j’utilise mes bras à autre chose. Un jour, j’ai acheté un éventail ancien sur lequel était représenté un Chinois qui tenait une lanterne. Ensuite, j’ai lu un proverbe qui disait que «l’expérience est une lanterne qui n’éclaire que son propre chemin». Je n’ai jamais oublié cette phrase, parce que je la trouvais terrible, je ne voulais pas qu’elle soit juste. J’espérais qu’il y ait plus. Et je l’ai trouvé, ce «plus»: nous ne pouvons transmettre notre expérience que parce que l’on devient nous-même. Par nos actes. Pas par nos discours. Nous ne pouvons pas expliquer notre expérience à quelqu’un, mais nous pouvons la rendre visible, et là devenir nous-même une lanterne. C’était important que je le comprenne, en tant que mère. Les enfants s’en foutent totalement de ce que vous leur dites. La seule chose qui restera en eux pour toujours, c’est ce que vous faites et ce que vous leur faites.

Est-ce que mieux se connaître permet de mieux s’aimer?

Oui.

Vous vous aimez?

(Très long silence.) Le vin est pour moi un bon antidépresseur. Hier soir, je suis allée faire une course au Paki de mon quartier. J’y ai acheté une bouteille de mauvais vin. En rentrant chez moi, je me suis demandé pourquoi je faisais ça. Et là m’est venue cette pensée qui m’a arrêtée quelques secondes: «Tu es une petite fille inconsolable.» Et c’est vrai. Je me suis dit que j’étais une petite fille; or, j’ai 55 ans. Vous savez ce que veut dire, « consoler »?

Heu... En fait non. Je n’en ai pas la moindre idée.

Si vous voulez être consolée, de quoi avez-vous envie?

De partager ma peine, peut-être.

Voilà, c’est exactement ça que veut dire «consoler». «Con» et «sole», être avec quelqu’un de seul, donc ne plus être seul. Votre définition est formidable, vous êtes beaucoup plus avancée que je ne l’étais ce matin, quand j’ai réfléchi à cette question. Moi, je me suis dit: «J’ai juste envie qu’on me prenne dans ses bras.» C’était bien la petite fille qui parlait. On m’a dit un jour: «Il faut que tu acceptes la douleur de la petite fille en toi.» Donc pour répondre à votre question: je m’aime de plus en plus, parce que je suis de plus en plus prête à accepter la peine de mon enfant intérieur. Je travaille à ramener à la surface les choses indicibles de mon passé, tellement indicibles que je les avais verrouillées.

GAEL JUIN

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