Liesbet Peremans

Testé pour vous: un week-end en voilier, sur les vagues de la mer du Nord

Nous avons loué pour un week-end un voilier et son équipage. Sensations fortes, escales gourmandes et culturelles lors des haltes à Ostende, Nieuport et Dunkerque : une expérience que l’on recommande ! Par Eva Nijborg et Hanne Vlogaert, avec la collaboration de Marie Aubin.

Le vent qui ébouriffe les cheveux et gonfle les voiles… Si nous rêvions de naviguer depuis longtemps, c’est tout de même avec une légère appréhension que nous mettons le cap sur Ostende pour notre baptême de voile à bord de l’Elise. Ce splendide voilier, dont l’intérieur a été imaginé par un designer de chez Ferrari, est à nous pour deux jours, équipage compris.

Holiday vibe dans le Sky District

Pour être sûres d’embarquer à temps le matin, la veille au soir, nous logeons à l’hôtel The Ostendian, dans le Sky District, près de la gare et du port de plaisance. Cet hôtel unique en son genre baigne dans une ambiance eighties hyper stylée. Avec son bar branché, il est depuis son ouverture en mars l’un des hotspots de la ville balnéaire — pas seulement pour les touristes, mais aussi pour les locaux, qui viennent volontiers y siroter un cocktail flashy ou une bonne bière. Après une rapide inspection de nos chambres — détail pittoresque : dans chacune d’elles est accroché le portrait d’un Ostendais célèbre —, nous nous rendons au bar. Il a des airs de nightclub fancy des années 80. Lovées dans nos fauteuils, nous sirotons nos verres et choisissons Rock of the 80’s sur la platine. Notre week-end commence ainsi au son d’Eye of the Tiger.

© Liesbet Peremans

Le lendemain, pas de grasse mat, car nous avons rendez-vous à 8 h 30 au Mercatordok. Les vrais marins ne partent pas l’estomac vide, donc nous faisons d’abord un crochet par le buffet de petit-déjeuner de The Ostendian. On écarquille les yeux en entrant dans la salle drapée de velours rouge, qui porte bien son nom : The Ballroom. Avec son bar à champagne, le buffet a lui aussi des allures royales.

La voile pour les nuls

Nous voilà rassasiées — et rassurées par la prise d’un comprimé préventif contre le mal de mer. L’aventure peut commencer ! Nous marchons quelques minutes jusqu’au port de plaisance, en passant devant le Mercator, et nous arrivons au voilier Elise, notre cocon sur mer pour tout le week-end. L’équipage de trois personnes nous accueille sur le pont. Hans Monstrey est le capitaine de ce bateau imposant. Il navigue depuis plus de vingt-cinq ans, on peut lui faire confiance. Chris et Hilde sont ses coskippers attitrés. Il a rencontré Chris dans le port d’Alicante, où il a acheté ce bateau qu’il a baptisé du nom de sa première petite-fille. Depuis, le trio a navigué sur bien des eaux et nous nous sentons en de bonnes mains.

L’équipage de trois personnes nous accueille sur le pont. Hans est le capitaine de ce bateau imposant. Il navigue depuis plus de vingt-cinq ans, on peut lui faire confiance.

De l’extérieur, l’Elise en impose déjà, mais l’intérieur dépasse nos attentes. On y découvre un élégant salon — une création de Pininfarina, le bureau de design qui a signé l’intérieur de plusieurs Ferrari — habillé d’acajou et de coussins bleu marine, une cuisine spacieuse, pas moins de cinq cabines doubles et quatre salles de bain. Et dire que nous pensions qu’en mer, il fallait renoncer au luxe…

© Liesbet Peremans

Nous enfilons nos gilets de sauvetage et quittons le port — non sans attendre un moment dans l’écluse, le temps d’être à niveau avec la mer. « Une huître, quelqu’un ? », lance Chris en désignant les parois autour de nous, couvertes de coquillages. Après une petite heure, nous passons enfin entre les deux phares, rouge et vert. Ces couleurs ne sont pas choisies au hasard : vert pour tribord (le côté droit du bateau), rouge pour bâbord (le gauche) — des termes qui remontent à l’époque des Vikings. Nous nous cassons un peu la tête pour essayer de retenir ce qui est quoi, mais à peine plus tard, nous voilà déjà à hisser les voiles comme de vrais moussaillons. La mer est relativement calme, mais il nous faut un petit moment pour trouver notre équilibre. L’équipage nous rassure : « On n’a encore jamais eu à repêcher quelqu’un. »

© Liesbet Peremans

Passagers VIP

Le soleil est haut dans le ciel, mais sur l’eau, il fait plus frais que prévu. Un pull n’est pas superflu. « C’est après l’été que la mer est la plus chaude, quand l’eau a eu le temps de se réchauffer », nous explique-t-on. Il faudra donc revenir pour naviguer les bras nus. En attendant, la brise fraîche ne nous arrête pas et on s’installe sur le pont. Le soleil sur le visage, le vent dans les cheveux… Ça fait un bien fou et la sensation est indescriptible.

© Liesbet Peremans

Tant d’action et d’air marin, ça creuse. Une fois amarrés à Nieuport-plage, pas besoin de chercher longtemps un restaurant plein de charme. Sur la presqu’île de De Kromme Hoek se trouve le restaurant authentique D’Oude Jachthaven. Tandis que nous admirons les objets maritimes — vieilles poulies et cartes hydrographiques —, l’équipage engage la conversation avec des amis navigateurs. Le monde est petit, en mer aussi. On se laisse tenter par le menu du jour. Et les croquettes aux crevettes, forcément.

Une petite balade digestive s’impose. Du port à la côte s’étend une jolie promenade. Nous admirons les girouettes colorées de l’artiste Daniel Buren, passons devant des boutiques sympas, saluons les phoques et terminons les pieds dans le sable. Cerise sur le gâteau — ou plutôt glace sur le cornet —, un arrêt chez St. Catherine, une institution à Nieuport-plage depuis 1985.

Le vent s’est levé, le bateau penche fort et une partie du pont est sous l’eau. Cœurs sensibles s’abstenir…

Nous ne pouvons pas trop traîner, car Dunkerque est encore à 11 milles nautiques, soit environ quatre heures de navigation. Le vent s’est levé, le bateau penche fort et une partie du pont est sous l’eau. Cœurs sensibles s’abstenir… et merci les comprimés anti-mal de mer ! Heureusement, nous accostons tôt à Dunkerque. L’heure de l’apéro sonne dans le coin VIP du bateau, à savoir le lounge cosy sur le pont. L’équipage nous offre une Jus de mer, la bière de Middelkerke. Ensuite, une promenade du soir nous mène vers l’autre port de Dunkerque, là où se trouve le Princess Elizabeth, un navire qui a participé à l’opération Dynamo pendant la Deuxième Guerre mondiale et sauvé 1 673 soldats alliés. Aujourd’hui définitivement amarré, le Princess Elizabeth ne sauve plus des vies, mais propose d’excellents repas ! Nous optons pour la prise du jour : du cabillaud. Dîner sur l’eau a un charme particulier. On se sent un peu comme des passagers de première classe sur le Titanic — avant naufrage —, sans doute grâce à l’escalier central en bois massif qui trône dans la salle à manger.

La lumière dans l’obscurité

Alors que nous revenons au port de plaisance du Grand Large, un mât lumineux s’aperçoit au loin : c’est l’Elise. Sur fond de ciel noir, il se détache clairement et surplombe tous les autres. Nous sommes impressionnées et nous ressentons combien l’équipage de ce voilier de haute mer est fier de son embarcation. Après un dernier verre dans le salon, nous regagnons notre cabine. Le bois verni, le linge blanc et le couvre-lit tricoté bleu et blanc donnent à l’intérieur du bateau quelque chose de nostalgique.

Dormir en mer, c’est comme être sur un matelas à eau. Et même si le clapotis dans le port est à peine perceptible, il nous berce délicieusement.

Dormir en mer, c’est comme être sur un matelas à eau. Et même si le clapotis dans le port est à peine perceptible, il nous berce délicieusement. Petit conseil pour les oreilles sensibles aux craquements : n’oubliez pas vos bouchons. Le lendemain, alors que Hilde et compagnie savourent leur café du matin à leur endroit préféré sur le pont — à l’abri du vent et au soleil —, nous partons explorer le centre historique de Dunkerque. À 8 h 30 précises, nous montons dans le bus. Le trajet est gratuit, comme tous les transports en commun à Dunkerque. Première étape : le Beffroi. Du haut de ses 58 mètres, ce clocher sert aujourd’hui surtout de point panoramique pour les touristes. Après une montée bien sentie (267 marches exactement), cap sur le LAAC, le musée d’art contemporain. Si le jardin de sculptures est présenté comme l’atout majeur, c’est l’intérieur qui nous séduit : on y admire des icônes du pop art et du nouveau réalisme, notamment des œuvres de Karel Appel, Andy Warhol et César Baldaccini.

Après la culture, la nature : direction la côte. Même tôt un dimanche matin, la digue baignée de soleil est déjà bien animée. Des cuistax remplis d’enfants rieurs zigzaguent entre les promeneurs avec chiens et les couples main dans la main sur la promenade. Les dunes ondulantes sont vraiment belles. On s’installe à la terrasse du Radisson Blu, vaste hôtel spa & wellness en bord de mer, pour — eurêka — notre premier café de la journée. Après une petite balade sur la plage, on bifurque à droite : cap sur le cœur de Malo-les-Bains, un quartier résidentiel réputé pour ses villas Art nouveau et autres bijoux d’architecture.

Balade Belle Époque

Le quartier date du 19e siècle, quand le boom de la culture balnéaire poussa de riches familles lilloises et parisiennes à y établir leur résidence d’été. Le résultat : un enchaînement charmant de façades colorées aux motifs floraux, arabesques Art nouveau et balcons en fer forgé. On s’en met plein les yeux tout en croquant dans un délicieux croissant acheté à La P’tite Fabrique, un artisan boulanger-pâtissier local près du casino.

© Liesbet Peremans

Après un arrêt au FRAC Grand Large, le Fonds régional d’art contemporain, qui s’étire tel un majestueux navire de verre en bord de mer, à deux pas du port de plaisance, nous filons vers l’Elise. À midi pile, l’équipage largue les amarres : cap sur Ostende. Combien de temps pour la traversée ? « Je dirais quatre heures, mais c’est difficile à prévoir précisément. La vitesse dépend du vent et des courants », explique notre capitaine. Est-ce que l’une de nous veut prendre la barre ? Il suffit de demander ! Sous l’œil bienveillant de Hilde, nous prenons le gouvernail. « Il faut toujours regarder l’avant du bateau. Pour garder le cap, il doit rester bien droit. S’il dévie à gauche ou à droite, à cause du vent ou du courant, il faut compenser. Gardez aussi un œil sur la boussole. » On a un peu de mal à coordonner le regard et le geste, mais on finit par y arriver. « Voilà, vous faites de la voile ! » Plutôt fières — mais avec des bras courbaturés —, nous rendons la barre au pro après un quart d’heure.

© Liesbet Peremans

Code zéro

Aujourd’hui aussi, la météo est avec nous : grand soleil, brise légère, et l’Elise fend paisiblement les vagues. Soudain, Hans lance un « Code zéro » et Chris et Hilde s’élancent aussitôt : il faut hisser la voile légère, plus grande et plus fine que la grand-voile classique avec laquelle nous naviguions jusqu’ici. Cette manœuvre doit nous permettre de gagner de la vitesse même par vent faible. Et ça marche : le bateau file comme une flèche, mais se met aussi à pencher fameusement, ce qui nous prend de court. « Pas de panique, sourit Hilde, qui a remarqué nos mines un peu crispées et nos doigts agrippés au banc. Même si les hiloires (les rebords pour se tenir, NDLR) sont complètement sous l’eau, il n’y a aucun danger. Grâce à la quille (une longue nageoire lestée de plomb sous la coque, NDLR), il est quasi impossible de chavirer. »

Le bateau file comme une flèche, mais se met aussi à pencher fameusement, ce qui nous prend de court.

Avec ces explications, nous nous détendons et, les yeux à nouveau tournés vers l’horizon, poursuivons paisiblement notre route. Après à peine deux heures et demie, nous accostons à Ostende. Sur la terrasse vitrée du club nautique, nous trinquons aux bons vents avec des cocktails. Après une courte halte chez Et alors — probablement le café le plus branché d’Ostende —, nous voilà déjà au dernier dîner de notre escapade. Dans le comptoir frigo de l’Apero Fish Palace, le poisson du jour pêché en mer du Nord côtoie d’élégants fruits de mer et un pavé de saumon d’une épaisseur alléchante. « Et si on prenait un peu de tout ? », propose l’un de nos matelots. En un clin d’œil, la table se couvre de moules au vin blanc, de boulettes fondantes aux crevettes, de sardines grillées et d’un plateau d’huîtres au citron. La fin parfaite d’un week-end génial, sur l’eau et en bord de mer. On se réjouit déjà de remettre ça l’été prochain, histoire de renforcer notre pied marin et d’approfondir nos connaissances de voileuses.

© Liesbet Peremans

À bord de l’Elise

Ce beau voilier et son équipage professionnel vous accueillent à partir de 725 € pour une demi-journée ou 1 050 € la journée, pour maximum 12 personnes. Réservation indispensable. Départ depuis Ostende, Nieuport ou Zeebruges. Ils proposent aussi des formules de plusieurs jours, notamment vers Dunkerque, Douvres, Ramsgate ou Breskens.

Réservation obligatoire par ici.

On profite encore un peu de la Côte:

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu des partenaires

Contenu sponsorisé