Camille Kouchner : “je veux établir un dialogue entre les féministes des années 70 et celles d’aujourd’hui” 

Quatre ans après son récit, “La familia grande”, cri de révolte face à l’inceste caché et impuni dont son frère jumeau a été la victime dans sa jeunesse, Camille Kouchner a-t-elle trouvé l’apaisement ? Quelle a été la suite au coup de tonnerre qu’elle a fait tomber sur une société élitiste à laquelle appartenait le bourreau de son frère et l’immense succès de librairie qui s’en est suivi ? Par Nicky Depasse.

Installées dans le bel espace du nouveau Filigranes boulevard de Waterloo à Bruxelles, nous rencontrons Camille KouchnerNous parlons de son nouveau et premier roman, une histoire bouleversante, d’une intimité qui nous touche toutes, un premier texte réussi dans une carrière littéraire qui s’est ouverte de manière tout-à-fait inattendue. 

Rencontre avec Camille Kouchner

Pourquoi votre héroïne se nomme-t-elle K ? K comme Kouchner, comme K”mille” ? 

Camille Kouchner : « Non, au départ, j’avais commencé à écrire cette histoire à la troisième personne. Comme il s’agit d’une métamorphose, le nom de K était une référence évidente à Kafka. Quand j’ai décidé de plutôt passer à la première personne, je me suis dit qu’il faudrait changer le nom de l’héroïne, sinon le lecteur allait croire qu’il s’agit clairement de moi dans cette histoire. Puis je me suis ravisée vu la question posée par ce roman : que fait-on de son enfance quand à l’adolescence, on est confronté à la métamorphose ? J’ai donc gardé le K. » 

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Justement, qu’est-ce que l’enfance ? Ce petit être qu’on porte toujours quelque part au fond de soi et qui, à un moment, veut à nouveau s’exprimer ? 

Camille Kouchner : « J’ai un rapport un peu particulier avec mon enfance comme je l’ai raconté dans “La familia grande”. Lors de la publication de ce livre, j’ai reçu beaucoup de témoignages de gens qui avaient vécu des situations similaires. Je me suis alors posé la question de savoir ce qu’on fait d’une telle enfance : est-ce un poids qu’il faut garder sur les épaules toute sa vie ou est-ce la lumière qui vous mène chaque jour vers un lendemain ? Je voulais donc avec ce premier roman faire la paix avec cette enfance. » 

Il y a une continuité entre ce roman et “La familia Grande” ? 

Camille Kouchner : « Quand ce livre est sorti, j’ai reçu énormément de témoignages de femmes qui m’ont raconté les violences qu’elles avaient subies. J’avais besoin de leur répondre mais je ne pouvais pas le faire de manière individuelle car d’une part, c’était trop dur pour moi et d’autre part, je ne me sentais pas légitime pour une telle démarche. J’ai donc imaginé un personnage fictif mais très réaliste pour lui faire vivre une histoire universelle. » 

Ça se passe dans les années 70 à 90, celles de parents qui ont vécu la libération sexuelle, ils sont très permissifs, une autre époque par rapport à aujourd’hui. Quelle mère êtes-vous, en fait ? 

Camille Kouchner : « Je pense que seuls mes enfants peuvent répondre à cette question car moi, j’ai la tête dans le guidon. Comme toutes les mères, je fais ce que je peux. Mais le meilleur moyen de savoir comment on élève ses enfants est de regarder comment on a été élevé. J’ai donc voulu établir un dialogue entre les féministes des années 70 et celles d’aujourd’hui. Sans aucun jugement, j’avais envie de décrire ce que nous sommes, les filles nées à cette époque de parents de milieux catholiques, laïques ou libertaires. » 

Y a-t-il encore aujourd’hui des difficultés de dialogue entre les générations ? 

Camille Kouchner : « J’ai l’impression que les enfants d’aujourd’hui communiquent beaucoup plus avec leurs parents qu’eux-mêmes ne l’ont fait. Il y a eu une génération entre les deux qui n’a pas beaucoup dialogué avec ses parents. Les trentenaires d’aujourd’hui parlent, elles communiquent, elles ont une grande compréhension du monde. Les quinquagénaires beaucoup moins ou pas du tout, et il se trouve qu’elles ont eu comme mères des femmes des années 70. La question est donc : qu’est-ce qu’elles ont à en dire ? » 

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Vous avez été une grande lectrice avant d’écrire ? 

Camille Kouchner : « Je le suis toujours. La littérature est ma manière de comprendre le monde. C’est mon moyen de réaliser ce que je fais là. J’ai eu besoin de lire “Les hauts de hurlevents” pour comprendre ma relation avec mon frère jumeau. » 

Quand on écrit un roman, on est bien souvent seul avec ses idées, vous éprouvez ce tourment libérateur ? 

Camille Kouchner : « Me mettre à écrire est un tourment saisissant mais qui me rassure beaucoup, comme si je me plaçais derrière une fenêtre pour observer le monde, sans avoir trop peur. » 

Quelle est la signification d’Immortels

Camille Kouchner : « Notre enfance est immortelle dans notre mortalité. L’enfance est ce qui finit par surnager, ce qui peut nous permettre une petite authenticité dans notre rapport aux autres. » 

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