Prix littéraire Gael: l’avis du jury

À la recherche de lectures pour l’été? Et si vous vous laissiez inspirer par les jurés de choc du Prix Gael? Cette semaine, ils vous donnent leur avis sur Loin des mosquées d’Armel Job.

La sélection de juillet du Prix Gael propose 3 regards masculins bien distincts. Cette semaine, c’est celui que pose Armel Job sur les mariages arrangés que notre jury a découvert avec Loin des mosquées. Qu’en ont-ils pensé?

Anne Meyer

Avis: ***

Cinq personnages se croisent et s'entrecroisent dans cette histoire étonnante et pleine de rebondissements inimaginables! Il y a René, le croque-mort célibataire endurci dont le train-train va être bouleversé malgré lui par son voisin turc; Evren, étudiant brillant turc aussi mais élevé en Belgique, un peu godiche et maladroit en quête d'une épouse; Derya, la jolie cousine qu'il voudrait bien prendre pour femme mais qui refuse ce mariage arrangé; Jasemin, une jeune paysanne -la nouvelle promise – choisie par les parents d'Evren qui, après la noce, apprend petit à petit à l'aimer.

Enfin, il y a Marcel, le colocataire retardé mental de René qui passe son temps à regarder les enquêtes de l'inspecteur Columbo. Mais pourquoi Derya ne veut-elle pas épouser Evren et comment réagira sa famille et quel est le secret si bien gardé de Jasemin? Quels rôles décisifs René et Marcel joueront-ils dans cette histoire si bien ficelée qui se lit d'une traite? La raconter serait enlever le côté palpitant de l'intrigue et lèverait un coin du voile sur le poids des traditions dans certains pays dont Armel Job veut incidemment nous faire prendre conscience de même qu'au travers des réactions de ces deux femmes rivales, il nous laisse entrevoir un combat pour plus de dignité et d'égalité. À lire absolument.

Catherine Hénaut

Avis: ***

Un roman fascinant qui vous tient en haleine de bout en bout; un corbillard transportant une dépouille est percuté par une voiture et la boucle est bouclée!

Entre-temps, Armel Job nous fait découvrir la communauté turque immigrée en Belgique et en Allemagne, nous entraîne dans une histoire d’amour vue différemment par chacun des personnages, en passant par les traditions musulmanes, le statut de la femme dans la société immigrée, la demande en mariage, le mariage arrangé, mais aussi le rejet et le combat pour échapper aux traditions, la jeunesse actuelle qui veut prendre ses distances avec l’islam, d’où découle l’honneur familial perdu, le besoin de justice, le tout mijoté à la sauce "Columbo".

Avec en toile de fond, un croque-mort sympathique, passeur de morts mais aussi de vivants, flanqué de son protégé justicier.

Ma lecture, qui sort gagnante de ce premier tiercé, et une cote maximale pour cet auteur que j’ai longtemps boudé à tort.

Julie Matagne

Avis: *

Dans cette histoire, les filles musulmanes sont farouches et rebelles, leurs pères et frères sont des assassins en puissance, sacrifiant tout pour sauvegarder l’honneur du sexe faible, et les mères sont "mortes à l’intérieur".

Loin des mosquées n’envisage qu’une voie de salut pour les hommes de l’islam: ils ne deviennent humains que s’ils adoptent les mœurs d’ici. En revanche, les filles des peuples de la Gaule sont de fieffées canailles, tandis que les policiers sont aussi perspicaces que dans les séries TV.

Le héros d’Armel Job est un Belge moyen, sans beaucoup d’atouts pour lui, mais bien brave. Le fanatisme n’est jamais loin, on se demande même si l’on peut y échapper. En tout cas, Armel Job, lui, est tombé dedans! À en croire son roman documenté par des ouvrages savants mais rédigé dans un style facile à lire, les islamistes sont parmi nous et ils ont le couteau entre les dents. Le scénario vous plaît? Sinon, on ne saurait trop vous conseiller de découvrir plutôt les auteurs arabes, loin des clichés tirés des faits divers... 

Delphine Motte

Avis: **

Armel Job nous emmène dans son roman au sein de l'univers des mariages forcés, un univers dont on connaît l'existence mais dont on ignore souvent les nombreuses implications et conséquences. Même si les personnages principaux ne sont pas pratiquants, Armel Job nous fait comprendre l'influence des coutumes et règles de famille. Règles qui, somme toute, sont détournées si cela peut servir leurs intérêts. L'honneur prend tellement d'importance qu'il arrive à pousser les personnages à avoir des comportements aberrants.

Le fait de faire vivre au lecteur le récit au travers des narrations des quatre personnages principaux donne du relief à cette histoire qui, sinon, pourrait être banale. Cette méthode de narration permet également d'aborder, avec humour parfois, les préjugés. Dommage que le roman s'essouffle quelque peu sur la fin. Un livre intéressant, sympa, qui se lit facilement.

Alexandre Seron

Avis: **

Ce roman de Job nous mène au gré des tribulations d’un jeune turc Belge. Dans la vie... et dans la famille. Liège. Quartier. Columbo en boucle à la télévision. Cologne. Cousine. Dans les yeux de la baigneuse de Renoir. Miroir d’une génération et d’une jeunesse immigrée au croisement entre tradition et modernité.

Dans ce roman, on retrouve la question du développement de soi et surtout de l’émancipation, à chaque ligne. De façon subtile et délicieuse à la fois. Par des petites histoires de petites gens comme il en est tant. Destins croisés et regards interculturels. Au cœur, une kyrielle d’intervenants surprenants, une litanie de proverbes bien frappés. Dont un croquemort acteur malgré lui, une mère véritable puits de dictons. En trame de fond aussi une question éminemment actuelle: le mariage... d’amour ou de convenance.

L’histoire de Job est un roman à plusieurs tourments, tournants et retournements. Un roman en effet déroutant

Loin des mosquées, Armel Job, Robert Laffont

A.D. et S.Z.

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